Wiki sur les laboratoires de création en bibliothèque

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Évaluation des espaces requis

Le manque d’espace est souvent invoqué comme obstacle à l’implantation d’un laboratoire de création. Si une vaste superficie offre effectivement une grande liberté dans le choix des fonctionnalités offertes, il faut garder à l’esprit qu’il est tout à fait possible d’implanter un laboratoire de création dans un espace retreint. Certains choisissent même de n’affecter des locaux (une salle de réunion, par exemple) à un tel usage que pendant des plages horaires précises.

Le processus de conception ne sera évidemment pas le même si on adapte un lieu existant ou si on doit construire un nouvel espace. Mais dans tous les cas, il demeure que les besoins des usagers, les objectifs recherchés par la bibliothèque et les moyens à sa disposition détermineront les fonctionnalités qui peuvent ou non être offertes.

La conception et l’aménagement du laboratoire peuvent même constituer une occasion privilégiée de repenser plus largement la disposition des lieux et les fonctionnalités dans l’ensemble de la bibliothèque. À titre d’exemple, la mise en place du Square Banque Nationale, dans l’axe sud du niveau 1 de la Grande Bibliothèque, a permis de repenser l’espace et de relocaliser les bandes dessinées dans l’axe nord, où elles sont dorénavant plus en évidence, ce qui a entraîné une augmentation de la consultation.

Le principe fondamental qui doit guider la réflexion est celui de l’adaptabilité. Les installations d’un laboratoire doivent suivre de près les avancées technologiques, et il est évidemment difficile de prévoir, parfois même à court terme, la nature de cette évolution, et donc les espaces requis. Qui aurait pu penser, il y a à peine cinq ans, que les imprimantes 3D feraient une telle percée dans les bibliothèques? Il est ainsi essentiel que le lieu soit pensé en fonction d’une évolution potentielle des usages et des pratiques (selon le mode du bêta perpétuel[1]). Il est également recommandé de prioriser des espaces flexibles où il est facile de passer d’un type d’activité à un autre. Cette polyvalence permet de multiplier les usages du laboratoire et de contrer d’éventuelles limites spatiales[2].

Une diversité de fonctionnalités dans un même lieu

Le tableau suivant présente différentes fonctionnalités qui peuvent être envisagées. Cette liste n’est cependant pas exhaustive. À noter qu’il n’est pas nécessaire de couvrir toutes les fonctionnalités pour répondre adéquatement aux besoins des usagers, et que certaines fonctionnalités peuvent occuper un même espace, simultanément ou en alternance[3].

Tableau 1. Considérations liées à l'espace

Fonctionnalité Description Considérations additionnelles
Accueil L’accueil doit permettre avant tout la réalisation de certaines tâches de bureau (le prêt d’équipement, par exemple). Il ne s’agit donc pas d’un comptoir de service au sens classique. Il ne doit surtout pas être envisagé comme le poste de travail des employés : ceux-ci doivent au contraire circuler au cœur des espaces afin d’intervenir auprès des usagers.
Activités de groupe Cet espace doit être flexible pour pouvoir accueillir différents types d’ateliers et d’activités. On prévoira de 20 à 30 places au moins si on compte offrir des ateliers à des groupes scolaires, avec au besoin un coin destiné à l’animateur, comprenant l’équipement nécessaire (surface de travail, poste informatique, écran et projecteur).
  • Les tables de travail doivent être faciles à déplacer (mobiles et basculantes) pour permettre de moduler le lieu selon le type d’activité.
  • Les activités peuvent se tenir dans l’espace réservé aux postes informatiques si ceux-ci sont des portables (faciles à retirer selon l’activité).
Postes informatiques Cet espace consacré aux projets informatiques (en solo ou en équipe) comporte des surfaces de travail assez grandes pour accueillir des ordinateurs et leurs accessoires (souris, clavier, haut-parleurs, etc.), des documents écrits et des effets personnels.
  • Cet espace peut être le même que celui réservé aux activités de groupe si les ordinateurs sont portables.
  • Il faut penser à inclure des mécanismes d’ancrage pour les ordinateurs portables et de nombreuses prises de courant.
Travail individuel ou en équipe L’espace est consacré ici au travail individuel ou en équipe, sans matériel informatique mais sur des surfaces de travail assez grandes.
  • Cet espace peut être le même que celui réservé aux postes informatiques si les ordinateurs sont portables.
  • On évitera les séparateurs qui divisent les tables et ne permettent qu’une utilisation individuelle des espaces de travail.
  • Il faut prévoir de nombreuses prises de courant et des mécanismes d’ancrage pour verrouiller certains équipements.
Rangement et entreposage Ce sont des étagères, des armoires ou des classeurs qui permettent de ranger le matériel de façon sécuritaire entre deux utilisations.
  • L’espace doit être verrouillé pour empêcher le vol du matériel, qu’il soit de petite ou de grande valeur.
Équipements spécialisés Cet espace fixe accueille les appareils spécialisés tels que les imprimantes 3D et les appareils de découpe au laser.
  • Il sera idéalement central et visible pour faciliter la supervision.
  • Certaines machines sont bruyantes, et leur localisation dans le laboratoire doit tenir compte de ce facteur.
  • Certains équipements nécessitent une ventilation particulière, qui doit aussi être prise en considération lors de l’aménagement des lieux.
  • Il peut être intéressant de localiser certains équipements le long d’une vitrine donnant sur les espaces d’usage général afin de susciter l’intérêt des visiteurs.
  • On doit évaluer si l’accès à certains équipements doit être contrôlé. Ce contrôle peut-il être fait à l’aide d’un boîtier sécurisé ou nécessite-t-il un lieu fermé? (Pour plus de détails, voir l’onglet Équipements.)
Enregistrement vidéo L’espace de tournage vidéo, qui peut inclure un écran vert, doit idéalement être assez grand pour permettre de filmer un plan moyen et comporter un éclairage adapté aux différents types de plans prévus.
  • Il est difficile de réduire l’espace consacré à cette fonctionnalité sans affecter la qualité des activités de tournage (le manque de profondeur empêche une bonne mise au point).
  • Plutôt que de consacrer une pièce trop petite à l’enregistrement vidéo, il est conseillé de miser sur la polyvalence et le partage de l’espace.
Enregistrement audio Cet espace consiste en un studio insonorisé pour l’enregistrement de musique, de baladodiffusions ou d’autres productions sonores. Dans une forme avancée, il peut être suffisamment grand pour accueillir plusieurs musiciens, leurs instruments et une console d’enregistrement.
  • Si la mise en place d’un tel espace n’est pas possible, l’enregistrement audio pourra se faire dans un espace polyvalent avec un ordinateur, des logiciels spécialisés et des accessoires d’enregistrement (micros, trépieds, écouteurs, etc.).
  • Dans un espace partagé, les bruits ambiants réduisent la qualité du résultat final, mais l’expérimentation restera enrichissante pour les usagers.
Détente et socialisation Cet espace permet aux usagers de prendre une pause, de se détendre et de socialiser entre eux.
  • Il s’agit d’un élément d’importance qui alimente les fonctions collaborative et ludique inhérentes aux laboratoires de création.
Jeu vidéo Cette section comporte des consoles de jeu et des écrans géants.
  • On peut la combiner à l’espace de détente.
Mise en valeur L’espace de mise en valeur des créations des usagers permet d’illustrer de façon concrète le type de créations réalisées sur place.
  • La mise en valeur peut être intégrée au poste d’accueil ou être faite en vitrine, à l’entrée du laboratoire ou le long d’un mur vitré, afin d’attirer les curieux et de susciter des interactions.
Vestiaire Il comprend des crochets ou des casiers où les usagers laisseront leurs manteaux et leurs effets personnels.
  • Si le vestiaire n’est pas surveillé et que les casiers ne peuvent pas être verrouillés, on indiquera clairement qu’il vaut mieux ne pas y laisser d’objets de valeur.
Projection vidéo Cette section peut comprendre un écran géant, un projecteur et de nombreux sièges permettant la tenue de différentes activités : visionnement des créations, soirée cinéma, tournoi de jeu vidéo (LAN party).
  • Cette fonctionnalité peut occuper le même espace que l’aire de détente ou l’espace de jeu vidéo.

Pour certaines fonctionnalités, dont l’enregistrement audio et vidéo, il est fortement recommandé de trouver des solutions créatives au manque d’espace plutôt que d’opter pour un espace trop restreint qui réduirait les possibilités d’utilisation et entraînerait des frustrations. La polyvalence et le partage des espaces sont à favoriser.

Par exemple, au Square Banque Nationale de BAnQ, on a installé un écran vert déroulable et un système d’éclairage au plafond, le long de la grille technique. Les usagers circulent normalement à cet endroit qui peut, au besoin, se convertir en plateau de tournage. Quand des usagers veulent tourner une vidéo, l’écran vert est déroulé et l’éclairage est activé. Les autres usagers doivent alors simplement contourner l’espace de tournage. Ce compromis n’est évidemment pas idéal puisqu’il ne permet pas d’insonoriser les lieux. Cependant, il est tout de même possible d’obtenir un niveau de bruit moins élevé par l’autorégulation des usagers.

Des ateliers de toutes les tailles : quelques exemples

Il est difficile de se projeter dans l’espace et d’imaginer comment peuvent y cohabiter différentes fonctionnalités. Cette étape est cependant fondamentale puisque la cohésion et la fluidité de l’offre en dépendent. Dans son Guide des laboratoires de fabrication dans les bibliothèques publiques[4], la Division du programme RAC de la Direction des bibliothèques de la Ville de Montréal s’est attelée à cette tâche complexe en colligeant de nombreuses informations afin de créer le tableau synthétique qui suit.

Voici également les caractéristiques physiques générales de trois laboratoires de création québécois, en date de juin 2017 :

Médialab de la bibliothèque de Sainte-Julie[5] Laboratoire de type Fab Lab à Brossard[6] Le Square Banque Nationale, à la Grande Bibliothèque[7]
  • 20 mètres carrés
  • 4 places assises
  • 4 ordinateurs portables
  • Postes spécialisés
  • Équipement de production sonore et musicale
  • Équipement de production photo et vidéo
  • Machines-outils de fabrication : appareil de découpe de vinyle, imprimante 3D, numériseur 3D, presse à chaud
  • 105 mètres carrés
  • 32 places assises
  • 4 postes informatiques
  • 6 ordinateurs portables
  • Surface de travail flexible (travail individuel ou d’équipe)
  • Postes spécialisés
  • Machines-outils de fabrication : appareil de découpe au laser, appareil de découpe de vinyle, fraiseuse numérique, presse à chaud, brodeuse numérique, imprimantes 3D, numériseur 3D, presse à macarons, tableau interactif, appareil de découpe pour papier et carton, trousses électroniques, outils de programmation robotique, outils traditionnels
  • 175 mètres carrés
  • Poste d’accueil
  • 6 postes informatiques fixes
  • 21 ordinateurs portables
  • Aire de travail individuel ou en équipe
  • Aire de travail sans ordinateur
  • Coin détente et jeu vidéo
  • Aire d’activités de groupe (travail individuel ou en équipe)
  • Postes spécialisés
  • Équipement de production sonore et musicale
  • Équipement de production photo et vidéo
  • Machines-outils de fabrication : imprimantes 3D, numériseur 3D
  • Vestiaire

 Un laboratoire de création sans local permanent

Certains choisissent de ne déployer que de temps à autre leur laboratoire de création, dans des lieux normalement réservés à d’autres usages (salle de réunion, salle de conférence, etc.). Une telle stratégie impose certaines conditions :

  • De l’équipement entièrement portatif;

  • Un espace d’entreposage adéquat;

  • Des étuis et des protections pour tous les appareils fragiles.

Quelques institutions, dont la bibliothèque publique de Toronto, misent également sur des laboratoires mobiles permettant d’offrir des ateliers dans les différentes bibliothèques de leur réseau. Cette stratégie a l’avantage de combler les besoins des établissements qui n’ont pas les ressources ou la superficie requises[8], ou dont l’intérêt de la clientèle ne justifie pas une installation permanente : la tenue d’activités ponctuelles à l’aide d’une « trousse techno mobile » peut alors s’avérer une offre parfaitement adaptée aux besoins. La trousse techno n’est cependant pas autosuffisante; elle ne connaîtra pas un grand succès si aucun accompagnement des usagers n’est planifié. Il faut donc se demander si un formateur – un médiateur compétent, qui peut être un employé de la bibliothèque ou un consultant invité – accompagnera l’équipement dans ses déplacements. Il faut aussi voir qui prendra en charge le transport et l’installation du matériel.

Si chaque bibliothèque qui accueille la trousse gère elle-même la structure de médiation qui l’entoure, il est important de mettre en place un système d’identification et de repérage des différentes pièces contenues dans la trousse, afin d’assurer le transfert intégral d’un établissement à l’autre. À cette fin, il est crucial de développer des procédures d’installation qui soient simples à communiquer ainsi que des protocoles d’utilisation et de présentation des technologies à l’intention d’animateurs non spécialistes.


Notes

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Estimer le budget nécessaire

Le budget nécessaire à l’implantation d’un laboratoire de création varie grandement d’un projet à l’autre. Le type d’équipements, le nombre de salariés et la nécessité ou non d’aménager des locaux sont quelques-uns des facteurs qui ont une influence considérable. Les dépenses relatives aux locaux, par exemple, seront beaucoup plus importantes si la bibliothèque en construit de nouveaux que si elle convertit simplement des espaces existants. Ce chapitre n’offre donc pas de grilles budgétaires préétablies, mais présente plutôt les éléments fondamentaux à prendre en considération dans l’évaluation et la rédaction des budgets.


Les grandes catégories de dépenses

Les dépenses d’immobilisation

La construction d’un local

C’est évidemment une dépense importante pour toute bibliothèque qui ne possède pas déjà un espace adéquat.

L’aménagement d’un local existant

Si on décide d’aménager un local existant, les coûts seront évidemment proportionnels à l’importance des travaux requis. Selon les fonctionnalités et les équipements envisagés, et selon l’état initial des lieux, cet aménagement peut aller d’un simple ajout de casiers de rangement à une reconfiguration complète : réfection du système de ventilation, ajout de prises de courant, installation d’une grille technique, division de l’espace, etc.

Afin d’obtenir une évaluation juste des coûts, il est recommandé d’établir une liste des aménagements ou des fonctionnalités souhaités, classés par ordre de priorité (essentiel, important ou accessoire), et de la faire parvenir au service responsable des immeubles de l’institution. Celui-ci devrait alors être en mesure de tracer différents scénarios d’aménagement en fonction de la faisabilité et des coûts. 

Les équipements

L’achat d’équipements constitue une autre dépense importante qui varie en fonction du type de laboratoire mis en place. Selon les besoins des usagers, celui-ci peut être constitué simplement d’ordinateurs et d’un ensemble de logiciels spécialisés (généralement dans le secteur du multimédia) ou d’une variété de machines-outils dont certaines peuvent parfois être coûteuses.

 Une bibliothèque désireuse de développer un laboratoire de type Fab Lab pourra consulter les lignes directrices de la Fab Foundation[1], qui recommande l’achat d’équipements et de matériaux pour un total allant de 40 000 $ US à 105 000 $ US. Il revient cependant à chaque établissement de déterminer dans quelle mesure ces recommandations cadrent avec les besoins de ses usagers et avec les fonctionnalités désirées.

 Le chapitre 9 du présent guide étudie cette question plus en détail. 

Le mobilier

En plus de l’équipement spécialisé, il ne faut pas négliger le coût du mobilier, qui joue un rôle important dans la flexibilité des lieux et le confort des usagers. Il est possible que des éléments de mobilier soient déjà disponibles dans le parc mobilier de l’institution; mais avant de décider de les utiliser, on s’assurera qu’ils sont bien adaptés à la mission du laboratoire et qu’ils sont assez polyvalents. 

Les dépenses récurrentes 

Les ressources humaines

Le salaire des ressources humaines consacrées au développement et au fonctionnement du laboratoire est une dépense à considérer, même si ces tâches sont intégrées aux responsabilités des employés déjà en place. Dans ce dernier cas, il importe d’évaluer correctement le temps qui sera consacré à ces nouvelles tâches : quel en sera l’impact sur les autres fonctions de la bibliothèque? 

Il faut par ailleurs garder à l’esprit que les types de fonctionnalités prévus influeront de manière significative sur l’importance des ressources humaines requises ainsi que sur l’intensité de l’accompagnement des usagers. Plus les fonctionnalités sont complexes ou les équipements spécialisés, plus l’accompagnement sera intense. 

Bien sûr, le budget consacré aux ressources humaines sera très différent dans un laboratoire offrant de l’accompagnement individuel et dans un autre qui mise sur une autonomie presque complète des usagers. À ce sujet, il faut noter qu’un objectif d’autonomie complète ou quasi complète est assez difficile, si ce n’est impossible, à atteindre : les laboratoires qui fonctionnent bien offrent presque toujours un accompagnement personnalisé et suffisant. 

Les heures d’ouverture du laboratoire, le nombre d’employés ainsi que le niveau du poste et la nature des interventions jouent également sur la hauteur du budget requis. Le chapitre 7 offre plus de détails sur la question des ressources humaines. 

Les réparations et la maintenance

Certains équipements commandent un entretien minutieux, si l’on veut minimiser les risques de bris. Mais même avec les meilleurs soins, les réparations sont inévitables, notamment parce que l’usage des équipements dans un contexte de laboratoire est souvent plus soutenu que celui normalement prévu par le fabricant. 

Il ne faut donc pas oublier d’inclure dans les prévisions budgétaires le coût des réparations (pièces, etc.), qu’elles soient réalisées par des experts (fabricant, fournisseur, etc.) ou par le personnel du laboratoire. À noter également : plus l’équipement est spécialisé, plus il est probable que certaines interventions ne puissent être faites par les employés du laboratoire. 

Les mises à jour

Le laboratoire doit offrir l’accès à des technologies qui répondent aux demandes et aux besoins changeants des usagers. Cela requiert de mettre à jour les équipements et l’offre logicielle du laboratoire lorsque nécessaire, et implique parfois de changer ou d’acquérir des équipements – sans qu’il soit essentiel de toujours posséder le modèle le plus récent, évidemment. 

Plusieurs de ces équipements sont déjà bien implantés et ont fait l’objet de nombreuses heures d’expérimentation; le développement de nouvelles fonctions « incontournables » n’est donc pas aussi fréquent qu’on pourrait le craindre. Il faut user de circonspection dans l’évaluation de ces nouvelles fonctions soi-disant indispensables et ne pas hésiter à interroger des collègues à ce sujet. 

Le renouvellement des licences logicielles

L’usage de plusieurs logiciels exige de faire l’achat et le renouvellement annuel des licences. L’utilisation de logiciels gratuits, qui sont souvent parfaitement adaptés aux besoins, peut cependant réduire les coûts de façon considérable. Un autre avantage de l’utilisation de logiciels libres est qu’ils permettent à l’usager de reproduire à la maison les travaux réalisés au laboratoire et de poursuivre son apprentissage, sans avoir à dépenser beaucoup. 

Il ne s’agit cependant pas d’une panacée; le choix de l’infrastructure logicielle doit être fait avant tout en fonction d’un environnement de travail efficace et des besoins réels des usagers. Souvent, une combinaison de logiciels libres et de logiciels propriétaires est appropriée. 

Les matériaux et consommables

Plusieurs machines consomment des matériaux qu’il faut inclure dans les dépenses récurrentes. Certains laboratoires demandent aux usagers d’apporter leurs propres matériaux, alors que d’autres les fournissent gratuitement ou les vendent sur place. 

Par exemple, plusieurs laboratoires de création imposent une tarification au gramme pour les filaments utilisés lors des impressions 3D. D’autres privilégient un fonctionnement à deux vitesses, où les filaments sont offerts gratuitement dans le cadre des démarches pédagogiques et en deçà d’un certain nombre de grammes par semaine (2 x 10 grammes par semaine, par exemple), et sont tarifés dans les autres cas. Mais peu importe le modèle préconisé, il restera toujours des coûts en consommables et en matériaux, ne serait-ce que pour l’entretien des machines (colle, vis, boulons[2], etc.). 

Attention, ici : il peut être tentant de laisser la possibilité aux usagers d’apporter leurs propres matériaux, mais une telle stratégie n’est pas sans risque, car il peut être difficile d’identifier la nature exacte des matériaux. Une composition autre que celle qui est recommandée ou prescrite peut parfois causer des problèmes importants, tels qu’un bris de l’appareil, voire l’émission de vapeurs toxiques. 

La promotion et la communication

Une part plus ou moins importante du budget peut être consacrée à la promotion des activités, que ce soit par la création et le maintien d’un portail Internet ou la mise en place d’une campagne de promotion (design graphique, production de dépliants ou d’affiches, etc.). 

Les plateformes collaboratives, en mode logiciel libre, peuvent réduire les coûts d’implantation de façon significative : il est donc on ne peut plus pertinent d’envisager cette option. À titre d’exemple, on peut citer la coquille de la plateforme collaborative du Square Banque Nationale[3]. La gratuité de la coquille n’élimine cependant pas la nécessité pour l’institution d’en développer certains aspects, par exemple la signature graphique. 

Les spécialistes invités

Il est recommandé de prévoir des sommes pour la rémunération des spécialistes invités à offrir des ateliers ou à donner des conférences. 

Les concours

Les concours permettent de promouvoir le laboratoire tout en stimulant l’activité des usagers. Si une telle avenue est privilégiée, on doit inclure les prix offerts aux gagnants dans la planification budgétaire. 

La formation du personnel

La formation nécessite l’embauche ponctuelle de spécialistes externes ou des visites dans différents milieux spécialisés, qui peuvent engendrer des coûts. 

Les assurances

Cet élément est capital, dans la mesure où les employés et les usagers ont à manipuler des appareils qui comportent parfois certains risques[4]. Il importe donc de vérifier si les assurances de l’institution couvrent bien ce genre de risques. Dans le cas contraire, les frais d’assurance supplémentaires représentent une dépense à ne pas négliger. 

Le loyer

Si la bibliothèque n’est pas propriétaire des locaux utilisés, le loyer constitue une dépense importante. 

L’électricité, le chauffage et la climatisation, Internet et l’entretien

Toutes les dépenses liées au bâtiment doivent être considérées, notamment l’électricité, le chauffage et la climatisation, l’accès Internet et l’entretien ménager. Elles sont souvent prises en charge par l’institution plutôt que d’être incluses dans le budget du laboratoire lui-même. 

Il faut noter que certains équipements de type Fab Lab consomment beaucoup d’électricité et demandent une ventilation adéquate, même lorsqu’aucune ventilation dédiée n’est requise. Les fonctionnalités de type médialab exigent, de leur côté, une connexion Internet particulièrement rapide et fiable. 

Puisque l’équipe institutionnelle affectée à l’entretien des locaux n’assure normalement pas l’entretien ou le nettoyage des équipements spécialisés, on doit également prévoir des sommes pour acquérir le matériel requis (produits nettoyants, lingettes, etc.). 

Les revenus auxiliaires

Des sources de revenus peuvent être nécessaires pour assurer le fonctionnement du laboratoire, ou pour permettre d’aller au-delà de l’offre de base. 

Certains laboratoires ont ainsi mis en place une tarification applicable aux formations spécialisées, comme celles destinées aux entreprises en démarrage. D’autres imposent des frais sur les consommables (filaments pour l’impression 3D, feuilles de vinyle, etc.) ou développent des modèles hybrides : par exemple, une activité est gratuite, mais les usagers peuvent avoir à payer les matériaux utilisés. 

Ces revenus représentent cependant des sommes marginales qui ne couvrent souvent que les frais des activités elles-mêmes. Selon l’étendue des budgets internes, l’examen d’autres avenues de financement peut donc s’avérer fort pertinent. 

Les commanditaires

Des entreprises privées locales peuvent être intéressées à appuyer financièrement le développement du laboratoire : aménagement, achat d’équipements, mise en place de concours ou d’un budget pour des activités de médiation, etc. 

Les subventions

Certains projets gouvernementaux peuvent financer l’implantation d’un laboratoire de création. Une revue des options existantes est donc essentielle, tant en amont qu’une fois le laboratoire en opération, puisqu’elles pourraient aider à mettre en place d’autres fonctionnalités. 

Des exemples de démarches d’évaluation des dépenses 

Les paramètres qui influencent la taille des postes budgétaires sont trop nombreux pour nous permettre de présenter des budgets détaillés. Il est cependant possible de proposer un ou deux scénarios quant à la démarche d’évaluation des dépenses. 

Scénario 1 : Développement du laboratoire à partir de locaux préexistants (aménagements minimaux) 

  1. On commence par déterminer la « mission » du laboratoire (besoins des usagers et axe de spécialisation projeté).

  2. Les dimensions des locaux disponibles vont sans doute dicter ou du moins circonscrire la quantité et la taille des « équipements » qu’il est physiquement envisageable d’acquérir pour répondre à la mission du laboratoire.

  3. Le choix des équipements permettra de déterminer la nature des « aménagements » requis.

  4. Selon les équipements et l’aménagement, on pourra dégager la nature, les dimensions et l’importance du « mobilier » à acquérir.

  5. La conjugaison de la superficie des lieux, du type d’équipements et de leur complexité, ainsi que de la mission du laboratoire permettra de juger de la quantité et du type de « ressources humaines » requises pour assurer le bon fonctionnement des activités (entretien, paramétrage, formation, médiation, promotion, gestion, développement, etc.). 

Scénario 2 : Développement du laboratoire à partir d’une enveloppe budgétaire 

  1. On commence par déterminer la « mission » du laboratoire (besoins des usagers et axe de spécialisation projeté).

  2. On établit les fonctionnalités requises par la mission ainsi que les « équipements » correspondants, tout en s’assurant que le budget prévu permette l’embauche d’un chargé de projet et l’aménagement de l’espace. Cette hypothèse suppose l’existence d’un budget de ressources humaines récurrent.

  3. On évalue les « ressources humaines » requises selon les fonctionnalités, les équipements projetés et la mission.

  4. On choisit, aménage et meuble les « locaux » selon les fonctionnalités, l’équipement et les ressources humaines planifiés.


 Notes

  1. Fab Foundation, « Setting up a Fablab », Fab Foundation, www.fabfoundation.org/index.php/setting-up-a-fab-lab/index.html (consulté le 20 juillet 2017).

  2. Les vis et les boulons sont utilisés dans le cadre d’activités de robotique ou d’électronique.

  3. À noter que la fonction de paramétrage des d’échanges entre institutions détentrices de la plateforme est en cours de développement.

  4. Voir les fiches des équipements de type Fab Lab sous l'onglet Répertoires des équipements.

 

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Équipement

Une certaine circonspection s’impose quant au choix des équipements. Sans plan clair et réfléchi, le budget d’acquisition peut facilement exploser : on s’éparpille dans toutes les directions sans que les équipements sélectionnés s’accordent nécessairement avec la mission fondamentale du laboratoire. Il faut notamment résister à la tentation des gadgets, ces éléments qui peuvent paraître novateurs et attirants, mais qui n’ont pas d’application réelle ou utile en lien avec les besoins des usagers ou l’orientation du laboratoire.

Afin de faire un choix réfléchi, il convient tout d’abord d’identifier avec précision la mission du laboratoire et, plus précisément, le ou les types de création que l’on veut y rendre possibles. Une fois cette étape complétée, on pourra identifier l’équipement nécessaire pour remplir la mission sans se perdre dans un bric-à-brac technologique.

Mais la réflexion ne s’arrête pas là : presque chaque type d’équipement est offert dans une gamme très variée de prix et peut présenter mille et une fonctionnalités connexes. Deux pièges sont à éviter ici :

  1. Aller automatiquement vers le moins cher par souci d’économie : on risque alors de passer à côté de fonctionnalités essentielles et d’acquérir des équipements de moindre qualité, ce qui peut engendrer des coûts de réparation ou de remplacement élevés;

  2. Au contraire, aller automatiquement vers des appareils très coûteux afin d’avoir le spectre le plus large possible de fonctionnalités ou d’options : il faut garder en tête que les appareils les plus chers ne sont pas nécessairement ceux qui conviennent le mieux aux besoins (il s’agit de l’attrait des gadgets, qu’on a signalé plus haut).

Les sections suivantes proposent des types d’équipements permettant différents projets de création. L’éventail des prix n’est pas indiqué – car ceux-ci changent parfois drastiquement avec le temps –, ni les modèles précis ou les fournisseurs. Pour obtenir de tels détails, il est suggéré de consulter directement les institutions qui se sont dotées d’un laboratoire de création. Par exemple, on peut connaître les fonctionnalités, le modèle ou le fournisseur des équipements analysés par BAnQ pour la mise en place du Square ou le projet Saint-Sulpice en consultant les annexes du présent document ou en s’adressant aux Services aux milieux documentaires de BAnQ. À noter que le wiki de Fab Lab Québec propose des listes d’équipements ainsi que des institutions qui s’en sont dotées. Il ne faut pas hésiter non plus à profiter des forums de discussion, comme celui présent dans ce wiki, et à lancer une bouteille à la mer : quelqu’un répondra sans aucun doute à vos questions et vous fera part de son expérience.

La liste établie par la Fab Foundation[1] peut aussi être utile. Son objectif est de permettre à tous les laboratoires de type Fab Lab de s’orienter vers des équipements similaires, afin que les usagers puissent s’engager dans des projets communs à grande échelle. Évidemment, il revient à chaque institution de déterminer si son laboratoire sera de type Fab Lab et dans quelle mesure celui-ci correspondra aux standards de la Fab Foundation.

La liste d’équipements de la Fab Foundation comprend différents fournisseurs et prix, qui sont cependant orientés vers le marché américain. Plutôt que de se fier uniquement à ce document, il est conseillé d’identifier et de comparer soi-même différents fournisseurs et de contacter des collègues d’autres institutions québécoises qui expérimentent avec des équipements semblables.


Les considérations générales

Certaines considérations s’appliquent à l’ensemble des acquisitions.

Solidité

Les différents outils et appareils seront soumis à un usage anormalement intense et seront souvent manipulés par des néophytes. Ils doivent donc être assez robustes pour garder une bonne durée de vie sans exiger continuellement des réparations ou des ajustements. Il faut aussi envisager l’achat de boîtiers protecteurs pour les équipements jugés plus fragiles, particulièrement ceux qui seront souvent manipulés (téléphones, tablettes, caméras, etc.) ou déplacés (dans le cas de laboratoires mobiles, en particulier).

Puissance

Spécialement pour les postes informatiques et les ordinateurs portables, la puissance doit être élevée afin que l’appareil soit rapide et fiable et que son utilisation soit fluide, permettant la reproduction instantanée à l’écran du souffle créateur de l’usager. Car si, par exemple, le transfert de fichiers prend beaucoup de temps, l’expérience générale en souffrira grandement.

Acquérir des ordinateurs puissants permet également d’assurer une durée de vie plus longue. Les applications et les logiciels évoluent rapidement et exigent de plus en plus de puissance. Il vaut donc mieux investir dans la performance dès le départ, plutôt que d’avoir à remplacer rapidement des appareils devenus désuets.

Sécurisation

Il importe d’assurer la sécurisation des équipements, que ce soit par le rangement dans des casiers verrouillés, l’utilisation d’ancrages sur les tables de travail ou l’enregistrement des emprunts dans le dossier des usagers. Les résultats sont actuellement mitigés quant à l’efficacité des puces RFID en laboratoire de création, mais la rapidité des progrès permettra sans doute bientôt d’obtenir une technologie satisfaisante.

La connexion aux systèmes informatiques doit également être fortement sécurisée. Si un usager arrive à accéder à une session en tant qu’« administrateur » sur un appareil, il pourrait aisément en modifier les paramètres ou changer le mot de passe, ce qui nécessiterait des procédures de déverrouillage complexes et potentiellement coûteuses. L’emploi de mots de passe sécuritaires et même de clés de sécurité U2F[2] (YubiKey) est essentiel.

Polyvalence

Les équipements qui peuvent être mis à profit dans plusieurs activités du laboratoire sont généralement plus utiles que ceux à vocation unique. L’ajout d’une grille technique[3] au plafond peut augmenter la polyvalence d’une multitude d’éléments, qu’on pourra alors facilement installer et déplacer. La présence d’un grand nombre de prises de courant est aussi souhaitable. À noter que la polyvalence des équipements peut avoir un effet sur leur fréquence d’utilisation : par exemple, une caméra servant à la prise de photos et à l’enregistrement de vidéos permet de réaliser deux fois plus de projets qu’une caméra à fonction unique.

Interopérabilité

Il faut idéalement opter pour des équipements qui sont compatibles entre eux, ce qui augmente leur polyvalence. Un micro dont la fonction principale est de permettre l’enregistrement musical a plus de valeur s’il peut aussi être branché dans une caméra pour améliorer la captation sonore lors de tournages vidéo. L’interopérabilité peut être favorisée par l’utilisation du même système d’exploitation dans la plupart des ordinateurs et par l’uniformité des câbles de branchement, des adaptateurs et des autres accessoires : par exemple, si un laboratoire veut se doter de différents types de caméras, celles-ci seront plus faciles à gérer si elles emploient le même type de piles et de cartes mémoire.


Fonctionnalités, activités et équipements

Cette section et les suivantes se penchent sur différentes fonctionnalités qui peuvent se partager entre plusieurs équipements. Dans le tableau, la colonne Fonctions met en évidence la polyvalence de certains appareils, et peut aider à cibler les équipements nécessaires pour rencontrer une fonctionnalité précise. Ainsi, un laboratoire qui souhaite miser sur la postproduction audio, par exemple, saura quels équipements privilégier.

La création sonore, musicale, vidéo et d’images

Pour plus de détails sur la mise en place d’un studio d’enregistrement vidéo, voir les documents disponibles sous l'onglet médialab de la section Documents.

Tableau 1. Équipements multimédia et fonctionnalités
Équipements Fonctions Commentaires
Ordinateur
  • Postproduction audio
  • Postproduction photo
  • Postproduction vidéo
  • Enregistrement audio
La puissance des ordinateurs doit être choisie en fonction des activités. La notion d’instantanéité est fondamentale ici, puisque le temps est souvent compté lors des activités (surtout dans un contexte d’accueil de groupes).
Écran d’ordinateur
  • Postproduction audio
  • Postproduction photo
  • Postproduction vidéo
  • Enregistrement audio
Pour la postproduction, le fait d’associer plusieurs écrans à un même poste facilite grandement le travail.
Microphone
  • Enregistrement audio
  • Enregistrement vidéo
Dynamique et/ou directionnel
Caméra
  • Enregistrement vidéo
Un même appareil peut faire office de caméra et d’appareil photo.
Appareil photo
  • Prise de photos
Un même appareil peut faire office de caméra et d’appareil photo.
Pied de microphone
  • Enregistrement audio
  • Enregistrement vidéo
Trépied (pour caméra ou appareil photo)
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Moniteur studio (haut-parleur)
  • Postproduction audio
  • Postproduction vidéo
Caisson de graves
  • Postproduction audio
  • Postproduction vidéo
Contrôleur MIDI – clavier
  • Création audio
Système d’enregistrement numérique
  • Création audio
Logiciel de montage vidéo
  • Postproduction vidéo
Logiciel d’effets visuels
  • Postproduction photo
  • Postproduction vidéo
Logiciel d’enregistrement audio
  • Création audio
Logiciel de dessin
  • Création photo
Plugiciels d’effets visuels et audio
  • Postproduction audio
  • Postproduction photo
  • Postproduction vidéo
Toile ou écran vert[4]
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Pour incrustation (remplacement de l’écran vert par un arrière-plan numérique)
Projecteur-diffuseur à DEL
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Perche pour microphone
  • Enregistrement vidéo
Filtre anti-pop
  • Enregistrement audio
Écouteurs
  • Enregistrement audio
  • Postproduction audio
  • Postproduction vidéo
Numériseur
  • Création photo
Tablette graphique
  • Création photo

Pour aller un peu plus loin…

Tableau 2. Encore plus d'équipements multimédia
Équipements Fonctions Commentaires
Contrôleur MIDI – boîte à rythmes
  • Création audio
Contrôleur MIDI – platine de mixage
  • Création audio
Contrôleur MIDI – surface de contrôle
  • Création audio
Surface de contrôle motorisée
  • Postproduction audio
Amplificateur
  • Création audio

La fabrication d’objets et l’impression 3D

Pour plus de détails, voir la section Répertoire des équipements, où l’on trouve les fiches techniques des équipements de type Fab Lab.

Tableau 3. Équipements de fabrication
Équipements Commentaires
Ordinateurs Plusieurs machines-outils sont contrôlées par ordinateur.
Défonceuse
Système de filtration de l’air Nécessaire pour plusieurs machines-outils.
Imprimante 3D à filaments
Imprimante 3D à résine
Numériseur 3D
Appareil de découpe de vinyle
Microfraiseuse
Appareil de découpe au laser
Thermoformeuse
Brodeuse électronique
Machine à coudre
Presse thermique
Presse à macarons
Lamineur
Outils traditionnels (marteau, tournevis, scie, etc.) La manipulation de certains de ces outils exige un encadrement plus serré (la scie, par exemple). Leur inclusion doit donc être envisagée avec une certaine prudence.

L’électronique, la robotique et la programmation informatique

Pour plus de détails, voir les fiches techniques des équipements de type Fab Lab sous l’onglet Équipements.

Tableau 4. Équipements d'électronique, de robotique et de programmation
Équipements Commentaires
Ordinateurs
Microcontrôleur ou micro-ordinateur Arduino ou Raspberry Pi
Ensemble d’initiation à l’électronique et au codage LittleBits, Makey Makey, Code Master ou Lego Mindstorms
Presse à rivets
Trousse de soudure Le type d’utilisation peut influencer l’aménagement : si l’utilisation est fréquente, une station permanente avec un système de ventilation adéquat pourrait être nécessaire.
À noter que les fers à souder nécessitent une ventilation dédiée : de petits extracteurs de fumée de précision doivent accompagner chaque fer.
Protoplaque (breadboard)

Les équipements additionnels

Il peut être intéressant de sonder directement les usagers avant de choisir les équipements spécialisés additionnels : sans être requis dans tous les laboratoires, certains peuvent être extrêmement intéressants pour un segment particulier de la population desservie.

Tableau 5. Équipements additionnels et fonctionnalités
Équipements Fonctions Commentaires
Équipement de capture de mouvements
  • Enregistrement vidéo sous forme de capture de mouvements
Logiciel de modélisation 3D
  • Postproduction vidéo
Pour la capture de mouvements.
Habit entier (morphsuit) vert
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Écran bleu[5]
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Pour incrustation (remplacement de l’écran bleu par un arrière-plan numérique)
Écran noir/blanc
  • Prise de photos
  • Enregistrement vidéo
Souvent utilisé en photographie et pour les clips musicaux, il permet de mettre le sujet en évidence. Le choix blanc/noir dépend de l’effet recherché.
Instruments de musique
  • Création audio
Instruments électroniques
  • Création audio
Micro-cravate
  • Enregistrement vidéo
Cabine d’enregistrement vocal
  • EEnregistrement audio
Accessoires de bruitage
  • Création audio
Caméra 360
  • Enregistrement vidéo
Imprimante 3D à filaments multi-couleurs
  • Impression 3D
Imprimante 3D alimentaire
  • Fabrication alimentaire
Console de jeu vidéo
  • Médiation et socialisation
  • Jeu vidéo
Suppose l’achat de jeux.
Contrôleur de jeu vidéo (manette)
  • Médiation et socialisation
  • Jeu vidéo
Surface de diffusion
  • Médiation et socialisation
  • Jeu vidéo
Télévision ou projecteur, notamment pour les jeux vidéo.
Casque de réalité virtuelle
  • Médiation et socialisation
  • Jeu vidéo
Capteur de position
  • Médiation et socialisation
  • Jeu vidéo
Kinect, Leap Motion
Convertisseurs de toutes sortes
  • Rétrothèque
Le succès d’une rétrothèque repose davantage sur la conversion d’un format ou d’un support à un autre que sur la diffusion.
Lecteur VHS
  • Rétrothèque
Lecteur DVD/Blu-ray
  • Rétrothèque
Lecteur Super 8
  • Rétrothèque
Lecteur Betamax
  • Rétrothèque
Projecteur de diapositives
  • Rétrothèque
Projecteur 8 mm
  • Rétrothèque
Projecteur 16 mm
  • Rétrothèque
Phonographe
  • Rétrothèque
Gramophone
  • Rétrothèque
Tourne-disque
  • Rétrothèque
Toile de projection
  • Rétrothèque

Les accessoires

Chaque appareil du laboratoire requiert des accessoires particuliers (câbles, adaptateurs, etc.). Ceux-ci sont essentiels, et il est recommandé d’en posséder une bonne quantité.

Tableau 6. Accessoires
Équipements Commentaires
Mécanisme de sécurisation Cadenas, puces RFID
Barre d’alimentation
Rallonge électrique
Câble jack (1/4, 1/8, 1/16)
Câble XLR
Station d’accueil
Projecteur
Toile de projection
Matériel d’entretien
Câble HDMI
Adaptateurs divers
Clé de mémoire Étudier la possibilité d’utiliser les clés qui ont été perdues en bibliothèque, à la fin du délai prescrit. Il faudra toutefois les reformater.
Câbles divers (câbles d’alimentation, USB, etc.)
Filaments pour imprimante 3D

Notes

  1. Fab Foundation, Fablab Inventorydocs.google.com/spreadsheets/d/1U-jcBWOJEjBT5A0N84IUubtcHKMEMtndQPLCkZCkVsU/pub?single=true&gid=0&output=html (consulté le 20 juillet 2017).

  2. La clé de sécurité U2F se branche comme une clé USB et permet d’authentifier la personne saisissant le mot de passe.

  3. Structure de barres d’acier offrant une multitude de points d’ancrage. La grille technique est souvent installée au-dessus des scènes de spectacle.

  4. Les vidéastes préfèrent souvent l’écran vert à l’écran bleu, car la luminosité du vert le rend plus distinct et facile à couper pendant le processus de postproduction. Les écrans verts produisent également moins de « bruit », ou de taches, autour du sujet.

  5. L’écran bleu fonctionne mieux pour les couleurs claires, comme les cheveux blonds, car il y a plus de contrastes entre les canaux. La couleur bleue permet également d’éviter les « déversements », le phénomène de contamination des sujets par l’arrière-plan vert, qui peut donner à la peau un teint maladif. L’écran bleu est également privilégié lorsque le sujet au premier plan est très près du fond. 

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Développer Frédéric Lemelin Développer Frédéric Lemelin

Ressources humaines

Le rôle de l’équipe responsable du laboratoire est primordial. Il est important de rappeler qu’un laboratoire de création ne vise pas uniquement à donner accès à des appareils de haute technologie : il a aussi (et surtout) pour fonction d’encadrer et d’accompagner les usagers. C’est donc l’enthousiasme, la créativité et la curiosité des membres de l’équipe en place qui lui permettront de réaliser sa mission.

Comme mentionné précédemment, le ratio idéal en laboratoire est d’environ 1 employé pour 12 usagers. La taille de l’équipe doit donc être ajustée en fonction du taux d’occupation et du taux d’utilisation des équipements. On doit également prendre en considération le temps requis pour les tâches administratives, la conception des activités, etc.

Mais il faut encore déterminer le profil qui sera pertinent chez les employés de votre laboratoire. La réponse à cette question n’est évidemment pas la même pour toutes les institutions et tous les genres d’initiatives. L’envergure du laboratoire, le type de projets qui s’y feront, l’intégration à des réseaux existants auront un impact considérable sur la nature des profils recherchés.

À titre d’exemple, un lieu axé sur la thérapie par l’art n’aura pas les mêmes besoins en ressources humaines qu’un atelier de fabrication collaboratif (de type Fab Lab). Par contre, l’ampleur des activités et des populations desservies aura toujours un impact critique sur la quantité d’employés nécessaire, quel que soit le type de laboratoire. Bref, il faut bien comprendre la nature de la mission de votre laboratoire de création pour identifier avec justesse le genre d’équipe qui pourra la porter.


Laboratoire de création : paradis des spécialistes ou lieu d’apprentissage par la technologie?

Avant d’aller plus loin, une mise en garde s’impose. Si plusieurs sont portés à associer la présence d’équipements de haute technologie avec celle d'experts techno, il faut rappeler que cet amalgame correspond peu à la réalité. En effet, la mission d’un laboratoire de création – qu’il soit axé sur des fonctions de type médialab ou de type Fab Lab – dépasse largement la simple présence de spécialistes du domaine.

Par exemple, l’atelier de fabrication collaboratif (de type Fab Lab), dans sa forme la plus achevée, vise à :

  • Transformer la relation entre l’individu et les moyens de production industrielle pour la faire passer de l’échelle internationale au niveau local;

  • Initier le citoyen à la fabrication d’objets qui répondent à des problèmes de la vie quotidienne et lui fournir les outils nécessaires;

  • Faire passer l’usager d’une position de consommateur de technologie vers une position de développeur.

L’esprit des ateliers de fabrication va donc au-delà de l’initiation à l’impression 3D ou aux machines-outils. Évidemment, il existe de nombreuses déclinaisons possibles de l’atelier de fabrication, du plus simple au plus complexe. Plus la mission comporte un degré élevé de complexité, plus on souhaitera inscrire le laboratoire dans le cadre précis du Fab Lab (la marque Fab Lab implique le respect d’une charte particulière), et plus il sera impératif que l’institution se dote de ressources humaines ayant un niveau de qualification élevé.

Un véritable Fab Lab, qui respecte précisément la charte Fab Lab, doit nécessairement regrouper des employés hautement qualifiés dans les processus de prototypage ou de création dans les domaines du design, de l’architecture, de l’ingénierie, de la fabrication, de la programmation, de l’électronique, etc., afin de maîtriser les processus de fabrication industrielle, les matériaux utilisés et les méthodes de médiation en innovation propres au réseau.

Bien sûr, le modèle Fab Lab n’est pas le seul qui soit envisageable. Dans plusieurs cas, la mise en place d’une série d’activités de type maker est suffisante pour combler les besoins de l’institution, et elle a l’avantage de permettre une intégration plus simple, en particulier dans un contexte où les ressources ne correspondent pas au niveau de spécialisation recherché dans un laboratoire de type Fab Lab.

Il demeure cependant qu’un laboratoire de création doit faire preuve d’agilité et ouvrir ses portes à des spécialistes de différents domaines.

Les qualités à prioriser

On doit rechercher certaines caractéristiques particulières chez les employés à embaucher ou à assigner au laboratoire :

  • La polyvalence, car il faut guider les usagers dans une multitude de tâches différentes;

  • La facilité d’apprentissage, car l’employé devra continuellement apprendre le fonctionnement de nouveaux outils, machines et logiciels;

  • La pédagogie, pour assurer le transfert de connaissances aux usagers, que ce soit sous la forme d’ateliers de groupe ou en accompagnement individuel;

  • La curiosité, car le laboratoire de création exige que les employés restent à l’affût des nouvelles technologies dont le lieu pourrait bénéficier, ou des nouveaux usages qui pourraient être implantés avec les outils déjà en place;

  • La créativité, car il faut tester, explorer et mettre en valeur des pratiques de création variées;

  • L’aisance technologique, puisqu’il faut évidemment avoir des compétences de base solides dans l’usage des nouvelles technologies;

  • La patience, car travailler avec les technologies exige souvent de déboguer des logiciels ou des machines, de faire preuve de rigueur et de minutie, et de prendre le temps nécessaire pour chercher une information, trouver une solution ou identifier la source d’un problème. La patience est aussi de mise dans le transfert des connaissances : il est plus facile d’influencer les usagers par un rythme de création progressif qui permet l’intégration organique des apprentissages, que de forcer une formation accélérée. En effet, les nouvelles technologies exploitées dans les ateliers de fabrication et les processus de prototypage ne fonctionnent pas par eux-mêmes; ils nécessitent donc de la part des employés et des usagers un apprentissage important et modulé dans le temps.

La recherche de candidats qui répondent à ces critères demande parfois de sortir des pratiques d’embauche habituelles de la bibliothèque. Dans le contexte d’un laboratoire de création, l’aisance avec les technologies peut parfois s’avérer plus précieuse qu’un diplôme reconnu. La diversité des équipes est souvent un gage de qualité et d’enrichissement pour l’ensemble du personnel attitré au laboratoire.

L’accompagnement des usagers peut lui aussi différer de ce qu’on voit normalement dans les bibliothèques. Les usagers des laboratoires de création peuvent demeurer sur place plusieurs heures et travailler sur le même projet pendant de multiples visites, ou ils peuvent au contraire entreprendre plusieurs courts projets différents en même temps. Le personnel doit donc être en mesure de fournir un accompagnement dans des projets de longue haleine comme dans l’expérimentation plus superficielle de différentes technologies ou techniques nécessaires à la production d’un objet ou d’un projet de bonne qualité, répondant à une problématique ou à une vision précise.

Idéalement, l’équipe doit être polyvalente et combiner des habiletés propres à différents champs : bibliothéconomie et sciences de l’information, médiation, animation, arts médiatiques, design, architecture et ingénierie, etc.

Enfin, dans les laboratoires consacrés à un public en particulier, on peut prioriser certains critères d’embauche pour s’assurer que le personnel puisse bien répondre aux besoins des usagers (une clientèle adolescente diffère d’une clientèle adulte, par exemple).

Une entrevue de sélection porteuse

Lors du processus d’embauche, il ne faut pas hésiter à demander aux candidats de présenter un portfolio : celui-ci permettra d’évaluer leurs compétences artistiques et leurs aptitudes créatrices, mais également leur capacité à passer d’une idée abstraite à un objet ou à une réalisation concrète.

II est aussi très important de tester leurs capacités de médiation par des simulations et des exercices d’animation.


Le rôle du bibliothécaire

Il est peu probable qu’un bibliothécaire ou tout autre employé possède à la fois le parcours universitaire et toutes les habiletés nécessaires en design, en architecture et dans les autres domaines liés à la création et à la fabrication. Il est donc naturel de placer le bibliothécaire au cœur d’une équipe qui, idéalement, sera multidisciplinaire. Mais quel rôle y jouera le professionnel de l’information?

La présence de plus en plus forte de laboratoires de création dans les bibliothèques montre bien les atomes crochus qui existent naturellement entre ces deux lieux d’apprentissage. Il n’est donc pas surprenant qu’un nombre croissant de bibliothécaires s’illustrent dans ces initiatives, et qu’on assiste donc à l’émergence d’une toute nouvelle génération de bibliothécaires techno ou de créateurs ayant différentes spécialisations et provenant d’horizons divers.

Au-delà de cette présence croissante de professionnels alliant les sciences de l’information et la création médiatique, et au-delà de la possibilité de développer des aptitudes en création et en fabrication d’objets (ce que peut faire tout individu amené à travailler dans un laboratoire de création), la place du bibliothécaire s’ancre plus particulièrement dans les domaines suivants :

Animation / médiation / éducation

Depuis très longtemps déjà, les bibliothèques développent et animent des activités liées à la littératie sous toutes ses formes : numérique, médiatique, technologique, etc. Ce rôle d’initiateur et de facilitateur a permis de consolider une vision puissante quant à la vulgarisation, à la conception d’activités, mais aussi à l’accompagnement des usagers dans un contexte d’appropriation des connaissances. Le bibliothécaire joue donc un rôle d’agent de liaison et de proximité avec l’usager, qui s’inscrit parfaitement dans le contexte d’un laboratoire de création.

La transmission des connaissances est au cœur de la mission des bibliothèques; les institutions non seulement partagent ces connaissances, mais en assurent le développement et l’appropriation par les usagers, une fonction qui s’applique particulièrement bien à la notion d’accompagnement et de formation inhérente aux laboratoires de création.

Comme le souligne pertinemment David R. Lankes dans Exigeons de meilleures bibliothèques – Plaidoyer pour une bibliothéconomie nouvelle, « si […] on considère que la connaissance est en mouvance, créée par des personnes et des communautés, la fonction de la bibliothèque change radicalement : elle devient alors un espace d’apprentissage actif[1] ».

« Si je veux étendre mes connaissances, la bibliothèque doit m’assister dans l’accomplissement de cet objectif. Dans certains cas, évidemment, il me suffit de lire sur ce qui m’intéresse, mais dans bien d’autres situations, il n’est possible d’apprendre qu’en essayant, en s’exerçant et en explorant[2]. » Le nerf de la guerre pour les bibliothécaires et, plus largement, les bibliothèques s’incarne donc dans une volonté de se positionner comme facilitateur de premier plan.

Lankes conclut en insistant sur le fait que « les bibliothèques doivent prendre part aux activités d’apprentissage des membres de leur communauté pour leur permettre d’accéder à des conversations et à des activités d’apprentissage plus poussées[3] ».

Administration

Les pratiques de gestion et d’administration propres aux bibliothèques se sont développées grâce à l’apport actif des bibliothécaires, qui ont su juxtaposer mission, impact, gestion et gouvernance publique. L’ajout d’une dimension de haute technologie à l’écosystème des procédures administratives est un défi certain. Des professionnels spécialisés ayant l’agilité de manœuvrer cet écosystème administratif constituent une grande force dans le cadre du développement d’un laboratoire de création.

Inclusion

La notion d’inclusion fait partie intégrante de la mission des bibliothèques, et les bibliothécaires ont su développer des approches concrètes afin d’offrir des services adaptés à différents types de clientèle, spécialisée ou non. Les férus de technologie, créateurs et designers à la tête des processus de prototypage pourront certainement bénéficier de ces approches afin de codévelopper, avec les bibliothécaires (qui sont parfois eux-mêmes des férus de technologie), des activités qui répondront parfaitement aux besoins spécifiques de ces différentes clientèles.

Documentation

Il ne faut pas oublier l’une des grandes forces de la profession : la faculté de documenter ou de rechercher l’information. Le monde des makers est parfois bien pauvre en matière de documentation, et l’intégration de laboratoires de création en bibliothèque amènera sans doute l’émergence d’une documentation plus étoffée des pratiques, usages et techniques, laquelle pourra alimenter le développement de nouveaux laboratoires, que ce soit en bibliothèque ou dans d’autres institutions culturelles.

Afin de participer à cet écosystème complexe de création, il faut évidemment être en mesure de décrire les processus, les projets, les pratiques issus de sa propre institution, mais également de rechercher l’information générée à l’extérieur. C’est un principe séculaire au cœur de la profession : il ne suffit pas qu’une chose existe, encore faut-il être en mesure de la retrouver!

Bref, le bibliothécaire occupe une place incontournable dans ces nouveaux laboratoires, où il peut briller à titre de médiateur, d’accompagnateur, d’administrateur ou de détenteur des habiletés traditionnelles au regard de la documentation des savoirs ou de la référence. Il ne peut évidemment pas agir seul, mais s’inscrira au sein d’une équipe multidisciplinaire.


L’équipe multidisciplinaire

Selon l’ampleur et la complexité des activités prévues, des technologies utilisées et des publics visés, la présence d’une équipe multidisciplinaire peut être pertinente ou même essentielle. Si le bibliothécaire est le spécialiste de la médiation, de l’administration, de l’inclusion et de la documentation, qu’en est-il des autres employés?

Ce sont d’abord des spécialistes en fabrication et en nouvelles technologies qu’il est nécessaire de recruter. En effet, au-delà de la capacité à vulgariser la façon d’utiliser une machine-outil, le personnel doit posséder une métacompétence : celle de pouvoir manœuvrer un écosystème complet d’équipements intimement reliés, afin de permettre à l’usager de fabriquer presque n’importe quoi, et de bien le faire. C’est qu’il est très facile de presque fabriquer n’importe quoi, mais qu’il est beaucoup plus difficile de fabriquer presque n’importe quoi.

La compétence clé des employés touche l’accompagnement des usagers dans leurs propres processus de prototypage. Plusieurs années de pratique et d’expérimentation et plusieurs prototypes ratés amènent souvent le développement de cette compétence recherchée. Comme la compréhension des processus de création est une faculté reliée à plusieurs domaines scolaires, il est difficile d’en viser un en particulier. De plus, il est possible qu’un candidat ait développé des habiletés dans le cadre de ses loisirs; c’est d’ailleurs le cas de plusieurs bibliothécaires.

Mais attention : si l’apprentissage de façon autodidacte peut sembler séduisant, il présente des limites certaines et n’est pas une panacée. En effet, le véritable processus de prototypage est relativement plus complexe qu’un bidouillage ludique. Il demeure donc important, dans l’affichage, de viser certains domaines scolaires qui sont naturellement porteurs des compétences désirées.

La rencontre recherchée entre savoirs théoriques et habiletés de médiation montre bien l’importance de réaliser une entrevue détaillée, où l’accent sera mis sur la découverte du portfolio et la réalisation d’un exercice de médiation. Bien cerner la personnalité du candidat sera aussi important afin de s’assurer qu’il s’inscrive bien dans la philosophie et les valeurs de la bibliothèque.

Selon la nature du laboratoire, certaines compétences en électronique et en programmation seront également nécessaires à une bonne complémentarité des ressources humaines et des compétences disponibles sur place. De nombreux défis pourraient surgir dans un contexte de technologie avancée si les employés présents ne sont pas en mesure d’aider un usager à résoudre les problèmes qu’il rencontre dans le domaine de la production et de la programmation électronique.

Suivant la nature du laboratoire, l’équipe devrait idéalement regrouper des profils dans les domaines suivants :

  • Bibliothéconomie;

  • Design / fabrication;

  • Électronique;

  • Programmation;

  • Multimédia.

Certaines compétences peuvent se retrouver chez une même personne, mais pas toujours. Les champs de compétence proposés répondent cependant à la diversité des questions et des besoins des usagers d’un laboratoire de fabrication.


Caractéristiques des différents types d’emplois

On retrouve une multiplicité de tâches dans les laboratoires de création, et l’émergence de ce nouveau secteur en bibliothèque peut créer une certaine confusion quant à leur répartition entre les différents corps d’emplois. Le tableau suivant propose quelques pistes par rapport aux types de tâches fréquentes en laboratoire de création. 

Tableau 1. Les tâches en laboratoire de création
Médiateur en numérique
(professionnel)
Technicien en nouvelles technologies
(personnel de soutien)
Commis
(personnel de soutien)
Développement stratégique
Développer et prendre en charge des projets spéciaux.
Participer à l’élaboration du plan d’action annuel.
Analyser les statistiques et émettre des recommandations et des rapports pour le coordonnateur.
Participer activement au développement et de l’offre technologique.
Ressources humaines
Superviser l’équipe.
Offrir de la formation aux employés.
Participer à la définition des besoins en formation de l’équipe.
Participer à l’embauche des nouveaux employés.
Réseaux et partenariats
Organiser des activités avec des collaborateurs externes dans le milieu de l’éducation.
Développer des partenariats et être un point de contact pour les partenaires en éducation.
Activités de médiation de groupe
Approuver les procédures. Offrir un soutien technique et logistique à la mise en place des activités.
Concevoir des activités de médiation et offrir un appui dans leur développement. Concevoir des activités de médiation.
Offrir un appui et de la formation pour l’animation des activités de groupe selon une approche méthodologique précise, et s’assurer de la qualité et de la réussite des activités. Animer les activités de groupe selon une approche méthodologique précise.
S’assurer de la qualité des activités de médiation offertes et faire des recommandations au coordonnateur.
Assurer une veille quant aux occasions à saisir et les communiquer.
Activités de médiation individuelles et vie de laboratoire
S’assurer de la qualité de l’accueil et de l’accompagnement. Assurer l’animation du lieu et faire le premier contact avec les usagers.
Appuyer le développement de l’approche globale d'accompagnement. Fournir un accompagnement personnalisé.
Veiller à la mise en place et au maintien d’une culture forte en matière de santé et sécurité au travail, et participer au développement des procédures. Veiller à ce que les équipements soient utilisés avec respect et participer au développement des procédures sur ce plan.
Connaître les usagers et leurs projets. Connaître les usagers et leurs projets.
Entretien des équipements
Proposer des procédures d’entretien et en assurer le respect. Effectuer la gestion quotidienne.
Veiller au bon maintien du parc technologique. Effectuer les diagnostics liés aux bris d’équipements.
Faire la gestion de l’inventaire.
Assurer les travaux de RD et la veille technologique.
Travaux de RD et veille technologique
Développer et consolider les approches d’apprentissage et de médiation. Développer des projets inspirants qui serviront de démos et d'embryons d'activités.
Rester à l’affût des pratiques émergentes et des techniques de fabrication. Rester à l’affût des pratiques émergentes et des techniques de fabrication.
Être à l’écoute de l’équipe et appuyer le développement de ses connaissances.
Tâches transactionnelles
Changer les jeux des consoles. Changer les jeux des consoles.
Effectuer les prêts d’équipement. Effectuer les prêts d’équipement.
Ouvrir ou fermer le laboratoire. Ouvrir ou fermer le laboratoire.
Recueillir des données statistiques. Recueillir des données statistiques.
Orienter les usagers de façon générale.

Formation

Les employés du laboratoire ne maîtriseront certainement pas toutes les technologies dès leur arrivée. Il est essentiel de les former au fonctionnement de l’ensemble des outils, machines et logiciels à la disposition des usagers, afin qu’ils puissent accompagner ceux-ci dans la réalisation de leurs projets; mais ce processus ne se réalise pas nécessairement par une démarche d’apprentissage traditionnelle. En effet, le partage et l’enseignement entre membres de l’équipe jouent bien souvent un rôle fondamental dans le développement d’une expertise commune.

Par ailleurs, il serait faux de penser que tous atteindront le même niveau d’habileté : il y aura bien souvent un spécialiste dans tout secteur particulier. Il est cependant essentiel que tous les membres de l’équipe partagent les mêmes connaissances de base au regard des équipements ou des techniques. Les questions des usagers ou des employés permettront d’alimenter et de développer la force en place.

Après les formations initiales, le mode du bêta perpétuel sera à privilégier. Celui-ci implique un apprentissage constant de l’usage des nouvelles technologies intégrées à l’offre de services. Il n’existe pas encore, pour les laboratoires de création, de formateurs professionnels suivant le schéma habituel des formations offertes aux bibliothèques (suite Office, gestion, etc.). Cependant, on peut miser sur différentes ressources et façons de faire pour faciliter la formation initiale :

  • Les outils en ligne (vidéos, baladodiffusions, webinaires);

  • Les spécialistes, qui peuvent provenir de l’externe (par exemple, un professionnel du cinéma pourrait venir enseigner l’usage du studio de tournage et des différents logiciels de montage);

  • Les employés eux-mêmes, qui partageront leurs connaissances particulières avec les autres membres de l’équipe;

  • Le réseau des laboratoires de création, qui offre souvent des formations spécialisées;

  • Les bibliothèques dotées d’un laboratoire, qui vont sans doute offrir de plus en plus de formations ou d’initiations sur les équipements en place;

  • La bonne vieille méthode essai-erreur, qui permet de se familiariser avec de nouveaux outils.

On pourrait penser que les fournisseurs sont à même d’offrir une formation complète sur les outils ou les équipements acquis, mais ce n’est malheureusement pas toujours le cas. Il faut donc évaluer cette option avec grande prudence. Plus souvent qu’autrement, la formation se révèle rudimentaire, et il sera nécessaire de rechercher ailleurs une source réelle d’information.

Il est par ailleurs fort utile de documenter ses apprentissages et de rédiger des procédures détaillées afin de faciliter la formation de futurs employés, ou même de partager ces informations avec d’autres laboratoires et bibliothèques.

Initier des membres du personnel général de la bibliothèque à l’usage des principales technologies du laboratoire peut également s’avérer utile. Les employés seront alors mieux au fait des activités qui s’y déroulent ainsi que de la mission du laboratoire. Cela renforcera le sentiment d’appartenance de tous et pourra même faciliter les éventuels remplacements ou mouvements de personnel. Il est important de démystifier les activités du laboratoire, car certains ne voient peut-être pas immédiatement leur pertinence en bibliothèque ou peuvent être intimidés par cette nouvelle offre de services. Cette initiation permet également d’identifier les membres du personnel qui pourraient être intéressés par une assignation permanente ou temporaire au laboratoire.

Enfin, il est important de laisser suffisamment de temps au personnel pour qu’il puisse se familiariser avec l’équipement avant l’ouverture du laboratoire. Plusieurs mois peuvent être nécessaires. Durant cette période, des journées « test », où le laboratoire accueille un nombre restreint d’usagers (ou d’employés de la bibliothèque), pourront permettre d’évaluer la pertinence de fournir différentes formations aux employés, en fonction des demandes du public et de la capacité à y répondre.


Notes

  1. David R. Lankes, Exigeons de meilleures bibliothèques – Plaidoyer pour une bibliothéconomie nouvelle, Montréal, Sens public, 2018, p. 90.

  2. Ibid., p. 91.

  3. Ibid., p. 99.

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Faire valoir le projet auprès des décideurs

L’argumentation et les ressources

On peut mettre de l’avant plusieurs arguments pour convaincre les décideurs de la pertinence d’un laboratoire de création en bibliothèque. Une stratégie intéressante consiste à identifier de quelle façon les principes qui sous-tendent le concept de laboratoire de création (voir les chapitres 1 et 2) rejoignent la mission et le plan directeur de l’institution.

Cet exercice est facilité par la volonté de démocratisation du savoir inhérente aux laboratoires de création, qui fait partie intégrante du Manifeste de l’UNESCO sur la bibliothèque publique[1] et de Bibliothèque d’aujourd’hui – Lignes directrices pour les bibliothèques publiques du Québec[2]. De plus, de nombreuses bibliothèques cherchent à moderniser leur offre de services et à y intégrer une philosophie « troisième lieu ». En encourageant la socialisation et le partage du savoir, et en mettant aussi l’accent sur la littératie numérique, les laboratoires de création répondent parfaitement à une telle orientation.

De nombreux ouvrages et articles exposent également les mérites des laboratoires de création en bibliothèque et peuvent fournir des éléments de réflexion correspondant au contexte précis de l’institution. Par exemple, si la bibliothèque cherche à augmenter son offre de services pour les adolescents, l’abondante littérature sur le principe HOMAGO (voir la section 2.4.2), le mouvement Connected Learning[3] ou la mise en valeur des disciplines STEM (Science, Technology, Engineering, and Mathematics) peut offrir des arguments solides.

L’identification de subventions offertes par les gouvernements pour ce type d’initiatives peut également fournir un argument de poids à présenter aux décideurs, toujours ouverts à l’idée d’obtenir des fonds pour améliorer les services en bibliothèque.

Assurer le développement d’une vision commune au sein des différentes unités administratives de la bibliothèque est une étape importante dans un projet de laboratoire. Il est essentiel d’établir une relation privilégiée avec le service des technologies de l’information, par exemple, puisque le laboratoire aura besoin d’un soutien technique, en particulier dans la phase de conception. Inclure cette équipe dès la phase de développement permet d’assurer la cohésion des parties prenantes; ce type de synergie peut sans aucun doute aider à convaincre les décideurs de la pertinence du projet.

L’évaluation et les indicateurs

Une fois le laboratoire mis en place, il est recommandé d’instaurer des mesures d’évaluation constante, de manière à cumuler les indicateurs permettant d’illustrer la pertinence du maintien ou du développement du laboratoire. Sans offrir un portrait véritablement exhaustif de la « performance » du laboratoire[4], les données quantitatives montrent l’importance de certaines tendances.

Avant toute chose, il importe cependant de cerner les objectifs du laboratoire. Cela permettra d’identifier les indicateurs relatifs à ces objectifs qu’il faudra compiler et interpréter, notamment au regard de leur évolution au fil du temps.

Afin de préciser ou de compléter le portrait tracé par les indicateurs, on peut choisir de recueillir des données qualitatives selon une méthode formelle (feuilles de commentaires) ou informelle (conversations avec les usagers). Cette démarche permet d’orienter le développement du laboratoire en ciblant les lacunes et les forces du projet.

Exemples de données statistiques à compiler :

  • Fréquentation (nombre d’entrées)

  • Occupation ou durée de la fréquentation (nombre d’usagers présents par plage horaire)

  • Nombre de demandes d’information

  • Nombre de demandes de formation

  • Nombre de participants aux concours

  • Nombre d’ateliers offerts

  • Nombre de conférences offertes

  • Nombre de participants aux ateliers

  • Nombre de participants aux conférences

  • Nombre de publications sur les réseaux sociaux

  • Nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux

Il est important de noter que les décideurs ont parfois une vision lacunaire de ce que doit être la mesure de la « performance » d’un laboratoire de création. Plus souvent qu’autrement, cette vision est basée sur des critères liés aux pratiques traditionnelles en bibliothèque, qui ne prennent peut-être pas en compte la spécificité d’un laboratoire.

Il est donc fort possible que les indicateurs ayant traditionnellement une signification importante (le nombre d’entrées, par exemple) ne soient pas les mêmes que ceux qui nourrissent le processus d’amélioration continue (la durée de la fréquentation, par exemple). Il est essentiel de prendre le temps de convenir, avec les décideurs, de la nature des données statistiques qui sont les plus pertinentes, à leurs yeux et aux vôtres.


Notes

  1. Manifeste de l’UNESCO sur la bibliothèque publique », op. cit.

  2. Association pour l’avancement des sciences et des techniques de la documentation (ASTED), Bibliothèque d’aujourd’hui. Lignes directrices pour les bibliothèques publiques du Québec, op. cit.

  3. Pour plus de détails, voir sous l’onglet Autres documents : Benjamin Bond, Médialab BAnQ — Contexte et cadre théorique du Médialabop. cit.

  4. La littérature sur le sujet souligne l’absence actuelle d’une méthode d’évaluation entièrement satisfaisante. Voir à ce sujet : Pia Margaret Gahagan, « Evaluating Makerspaces: Exploring Methods Used to Assess the Outcomes of Public Library Makerspaces », mémoire de maîtrise, Wellington, Victoria University of Wellington, School of Information Management, 2016, researcharchive.vuw.ac.nz/xmlui/bitstream/handle/10063/5193/report.pdf?sequence=1 (consulté le 20 juillet 2017).

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